« Israël contre l’ONU » ou l’ONU contre Israël ?
Par RENÉE FREGOSI
Quand l’ONU devient une tribune pour ceux qui veulent déstabiliser la patrie des droits de l’Homme
Dans un contexte géopolitique marqué par des tensions croissantes, Israël se retrouve fréquemment au cœur des critiques, tant sur la scène médiatique qu’internationale. Souvent accusé d’être un État belliqueux, voire l’ennemi des principes de paix incarnés par l’ONU, ce pays est régulièrement pointé du doigt pour son rôle au Moyen-Orient. Pourtant, à y regarder de plus près, il semble que les attaques contre Israël soient le reflet d’une dérive inquiétante au sein même de l’ONU. L’organisation, autrefois porteuse d’un idéal démocratique, est aujourd’hui dominée par une majorité d’États non démocratiques, dont l’hostilité envers Israël ne fait que s’accentuer.
Le plus souvent sous couvert d’une critique de son premier ministre Benjamin Netanyahu diabolisé à l’envi, Israël est désormais présenté comme un État foncièrement belliqueux, comme le responsable des crises au Moyen Orient, et même, rien de moins, comme l’ennemi de l’ONU. « La longue histoire d’Israël contre l’ONU[1] », « La haine d’Israël contre l’ONU[2] », depuis un an, le propalestinisme (instrumentalisation de ladite « cause palestinienne » pour contester la légitimité d’Israël) instille dans une certaine presse, l’idée selon laquelle l’État d’Israël se dresserait contre « la communauté internationale » et son principe du droit fondé sur la paix. Dans le monde politique français, les attaques contre Israël se multiplient également et se banalisent, des propos venimeux de Dominique de Villepin aux saillies de Jean-Luc Mélenchon et de ses disciples de LFI, en passant par les déclarations d’Emmanuel Macron péremptoires et souvent erronées (comme sa récente menace voilée à Israël lui rappelant à tort, que l’ONU l’avait « créé » comme État).
Or, plutôt que de présenter « Israël contre l’ONU », ne conviendrait-il pas de constater l’inverse : l’ONU contre Israël.
Certes, la personnification de l’organisation internationale est inappropriée dans les deux versions puisque l’ONU n’est pas une entité indépendante mais le reflet des rapports de forces géopolitiques, prenant par conséquent des positions changeantes selon les évolutions du monde. L’ONU d’aujourd’hui n’est plus, à l’évidence, celle de 1945. La composition des différents organes de l’ONU et leurs dysfonctionnements sont ainsi édifiants.
L’ONU sous hégémonie des dictatures
Á l’encontre de son principe démocratique fondateur l’ONU, est devenu le lieu privilégié de la convergence et parfois de l’alliance des nombreuses dictatures à travers le monde, notamment des régimes islamistes de toutes obédiences et des héritiers plus ou moins lointains du bolchevisme. Ainsi en 2022, parmi la majorité non démocratique des pays membres de la Commission de la condition de la femme, siégeaient l’Afghanistan, l’Arabie saoudite, le Pakistan et l’Iran. En 2023, le Conseil des Droits de l’Homme, était composé à 70% de pays non-démocratiques, parmi lesquels la Chine, Cuba, l’Algérie, l’Érythrée ou le Kazakhstan. Et on retrouve des majorités non-démocratiques similaires à la Commission des ONG ou à l’UNESCO.
Comment s’étonner alors d’un biais manifeste de l’ONU à l’encontre d’Israël, pays démocratique en première ligne contre l’offensive islamiste anti-occidentale ? Le nombre de résolutions contre Israël surpasse en effet de loin celui concernant chacun des autres pays et est même supérieur au total de toutes les autres condamnations. Selon l’ONG UN Watch, entre 2015 et 2023, l’Assemblée générale a voté 155 résolutions contre Israël tandis que la Chine, Cuba, le Venezuela ou le Zimbabwe par exemple n’est recevaient aucune et que l’Iran était condamné 8 fois, la Russie 24 et les États-Unis 10 fois. Pendant la même période, l’OMS a condamné 10 fois Israël et aucune fois les autres pays. Enfin, entre 2006 et 2023, le conseil des droits de l’Homme qui a même un agenda spécial pour l’observation des violations de Droits de l’Homme en Israël (et pour aucun autre pays), a condamné 108 fois Israël, contre 17 fois la Corée du Nord par exemple et toujours aucune fois la Chine, de même qu’étaient totalement épargnés le Qatar, le Pakistan ou l’Arabie Saoudite.
Par ailleurs, une campagne pernicieuse, visant à dénier aux Juifs toute légitimité à vivre sur la terre d’Israël, tend à promouvoir une Histoire fantasmatique où seuls les « Palestiniens » en auraient été les habitants depuis l’origine des temps. En octobre 2016, Commission du Programme et des Relations extérieures de l’UNESCO, votait ainsi une résolution réclamant que soit ignoré le terme hébreu « Mont du Temple » au profit de l’usage unique du terme « mosquée d’Al-Aqsa » ou « esplanade des mosquées ».
Mais c’est sans doute les « conférences de Durban » qui illustrent le mieux l’emprise des ennemis d’Israël sur l’ONU. Lors de la première de ces grandes rencontres contre le racisme en 2001, les attaques contre Israël ont commencé en séances plénières, Yasser Arafat n’hésitant pas à parler « d’apartheid », « d’épuration ethnique » ou de « génocide ». Et lors du Forum des ONG (plus de 6000), l’antisémitisme s’est déchainé : des slogans « Mort à Israël » et « Mort aux Juifs » ont été scandés et des agressions ont été commises sur des Juifs et des soutiens d’Israël (insultes, coups, bousculades, menaces). Sur les panneaux et les banderoles des manifestants on pouvait lire : « One jew = One bullet » (Un juif = une balle), accompagnés de caricatures ranimant la haine des Juifs. Les Protocoles des Sages de Sion et Mein Kampfétaient en vente sur les stands de certaines ONG tandis que des participants offusqués et des militants d’associations juives étaient molestés.
Dissoudre l’UNRWA
Au demeurant, c’est peut-être l’aberration que constitue l’UNRWA (United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East) qui manifeste le mieux la lente pénétration du propalestinisme dans l’ONU. Créée en 1949 pour venir en aide aux près de 700 000 Arabes de Palestine déplacés durant la lutte d’indépendance menée par les Juifs de Palestine mandataire, l’UNRWA aujourd’hui est la plus grande agence des Nations unies. Tandis qu’elle devait être dissoute en 1953 (toute mission de l’ONU concernant des réfugiés étant conçue pour un temps limité de un à trois ans) l’agence a poursuivi son activité jusqu’à ce jour. Considérant comme des réfugiés au même titre que leurs ascendants de 1949, tous lesdits Palestiniens des générations suivantes, l’UNRWA contribue à perpétuer l’exigence d’un « droit au retour » de plus en plus illusoire le temps passant et la population concernée atteignant désormais environ 5 millions de personnes.
Disposant d’un budget annuel de plus d’un milliard de dollars et employant près de 27 000 personnes, dont 99 % sont recrutés localement, l’UNRWA cautionne un enseignement foncièrement anti-juifs dans ses écoles, la dissimulation dans ses hôpitaux et bâtiments administratifs d’une partie de l’arsenal du Hamas et d’autres groupes terroristes palestiniens, la construction des centaines de km de tunnels à usage militaire contre Israël sous la Bande de Gaza, le détournement par les djihadistes de sommes importantes et de l’aide alimentaire et en médicaments destinées à la population et la transformation des Gazaouis en boucliers humains. Ce scandale a atteignant son summum avec la découverte de l’implication dans les massacres du 7 octobre 2023, de plusieurs employés de l’agence onusienne dans la Bande de Gaza.
La responsabilité des Occidentaux
Mais les pays occidentaux continuent de financer l’UNRWA qui a même été pressentie pour le prix Nobel de la paix 2024. Le 1er février 2024, le député travailliste norvégien Åsmund Aukrust, vice-président de la commission des affaires étrangères au Parlement, a annoncé avoir soumis la candidature de l’UNRWA « pour son travail de longue haleine visant à fournir un soutien vital à la Palestine et à la région en général », travail « crucial depuis plus de 70 ans, et encore plus vital depuis les trois derniers mois ». Et il ne s’agissait pas d’une lubie de la part d’un militant propalestiniste confirmé. Le 3 octobre dernier, l’agence Reuter estimait que l’UNRWA était parmi les favoris pour recevoir la prestigieuse distinction, la Cour Internationale de justice (CIJ) et le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, étant également pressentis. Finalement, le 11 octobre, le Prix Nobel a été attribué dans l’indifférence générale mondiale, à l’organisation japonaise Nihon Hidankyo pour son combat contre l’arme atomique.
Au demeurant, que l’ONU ait bien failli être primé est symptomatique de l’état du monde aujourd’hui.
Comment s’étonner alors qu’Israël souhaite voir enfin dissoute cette officine propalestiniste qu’est l’UNRAW et que Tsahal n’hésite plus à bousculer la FINUL qui fait le joue du Hezbollah au sud Liban ? Mais une fois encore, les rôles sont inversés. On s’offusque de la riposte israélienne pour protéger sa frontière nord, et on laisse sans broncher le Commissaire général de l’UNRWA dénoncer Israël au motif qu’il ferait de la destruction de l’agence « un but de guerre[3] ». Ce sont pourtant toutes les démocraties occidentales qui devraient réclamer cette dissolution. Plutôt que de conspuer Israël au motif qu’il serait « contre l’ONU », nos dirigeants devraient prendre la mesure du danger d’une ONU qui orchestre son concert des nations contre Israël. Notre cécité ou notre lâcheté sont non seulement honteuses pour ne pas défendre Israël dans sa lutte existentielle, mais également suicidaires face à la montée en puissance globale des dictatures et à l’offensive islamiste en particulier.
Renée Fregosi
Philosophe et politologue. Présidente du CECIEC.
Dernier ouvrage paru : Cinquante nuances de dictature. Tentations et emprises autoritaires en France et ailleurs. Éditions de l’Aube 2023
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[1] Le Monde https://www.lemonde.fr/un-si-proche-orient/article/2023/12/24/la-longue-histoire-d-israel-contre-l-onu_6207534_6116995.html
[2] Marianne
[3] France24 https://www.france24.com/fr/moyen-orient/20241015-israel-unrwa-refugies-palestiniens-loi-knesset-onu-gaza-cisjordanie-netanyahu
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Merci à Renée Fregosi pour cet article plein d’enseignement mais extrêmement angoissant. Pratiquement toutes les organisations internationales sont désormais antisémites. Qu’avons nous fait pour mériter cela ? Pourquoi ne sortons-nous pas de ces paniers de crabes ?