Bombardements au Liban : Ces réfugiés syriens qui retournent en Syrie, un choix « entre la peste et le choléra »

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C’est une double peine. Les bombardements israéliens qui pleuvent sur le Liban poussent des millions de personnes à fuir le pays. Parmi elles, des réfugiés syriens qui avaient déjà échappé à la dictature de Bachar al-Assad et à la guerre civile qui ravage leur pays depuis 2011. « Quand elles sont passées pour aller vers le Liban, elles ont déjà de facto tout perdu, et aujourd’hui, la plupart n’a nulle part où revenir en Syrie », souligne Clément Chappe, responsable de la cellule urgence de Médecins du Monde.

Il n’existe pas de chiffre précis de ces mouvements de populations mais des estimations des différentes ONG sur place ont enregistré quelque 487.000 réfugiés syriens qui auraient traversé la frontière depuis le Liban vers la Syrie, et parmi eux, 25 % de femmes. Cette projection ne concerne que les réfugiés syriens enregistrés auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), car certains ne sont pas enregistrés, précise Clément Chappe.

La route menant du Liban en Syrie a par ailleurs été visée ce jeudi pour la deuxième fois depuis le 5 octobre dernier, poussant la population à trouver de nouveaux points de passage moins dangereux, ce qui complique encore leur recensement.

Nulle part où aller

Une fois sur place, la situation est aussi difficile. « S’ils font ce choix de retourner en Syrie, c’est qu’ils le jugent moins risqué, mais entre la peste et le choléra, ce n’est pas facile de choisir », résume une source humanitaire dont l’ONG est présente dans l’Est syrien et notamment à Raqqa. « Ces personnes vont principalement vers le gouvernorat d’Alep et vers le nord-est syrien, sous autorité kurde. Ce sont des bus entiers, soit 1.500 personnes par jour environ, qui arrivent également dans l’ancien fief de l’Etat islamique qui échappe au gouvernorat de Damas », précise cette même source.

Ces personnes poussées une nouvelle fois à fuir la violence tentent, sur place, de « retourner dans leur famille, mais la plupart, qui étaient au Liban depuis longtemps, n’ont pas forcément de lieu d’accueil. Beaucoup se retrouvent soit dans des camps informels de déplacés internes soit dans des camps un peu plus formels, érigés pour les accueillir », ajoute encore la source anonyme humanitaire. « Ils n’ont que de maigres ressources et aucun endroit sûr où aller », confirme dans un communiqué le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi.

Une sécurité quasi inexistante

La Syrie n’est pas un pays considéré comme sûr par le HCR. Et certains Syriens qui ont été contraints au départ il y a une dizaine d’années prennent nécessairement des risques pour leur sécurité, notamment celui d’être arrêté par les autorités du régime. C’est le cas d’Ahmad, dont l’épouse a été interrogée par Le Monde, et qui a choisi de ne pas suivre sa femme et de rester au Liban. « On est restés jusqu’au bout, mais les frappes aériennes sont trop puissantes », raconte par ailleurs au quotidien Ali, la cinquantaine, qui constate amèrement : « La guerre nous a expédiés au Liban, elle nous réexpédie en Syrie. »

Il ne s’agit pas tellement d’un choix, mais d’un déplacement forcé, estime notre source humanitaire anonyme. Pour lui, « s’ils n’y sont pas retournés avant, malgré une situation déjà extrêmement vulnérable au Liban, c’est très certainement parce que les conditions de sécurité pour eux, pour leur famille, sont quasiment inexistantes. »

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Lorsque la crise syrienne a éclaté en 2011, le Liban a en effet fait preuve d’une capacité d’accueil remarquable, prenant en son sein quelque 1,5 million de réfugiés, pour une population totale de 5,49 millions d’habitants, selon Human Rights Watch (HRW). Mais leurs conditions se sont considérablement dégradées en 2019, quand le Liban s’est effondré économiquement, financièrement et politiquement. Quand la population libanaise a été précipitée dans une grande précarité, les récriminations envers les réfugiés ont été exacerbées. Ces Syriens subissaient ainsi déjà « un contexte compliqué préexistant aux bombardements israéliens », note la source humanitaire. Des frappes qui ont encore un peu plus empiré leurs conditions de vie.

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