L’Inde et la guerre israélo-palestinienne : un virage géopolitique affirmé
La position de l’Inde vis-à-vis du conflit israélo-palestinien a connu des transformations notables, marquant un changement profond dans la politique extérieure du pays envers l’Asie occidentale. Bien que ce changement ne soit pas survenu de manière soudaine ou à la suite des attaques du 7 octobre 2023, il s’inscrit dans une évolution plus large, amorcée avec l’arrivée au pouvoir de Narendra Modi en 2014.
Le 7 octobre 2023, le Hamas a lancé une attaque sans précédent dans le sud d’Israël, faisant plus d’un millier de victimes israéliennes et capturant près de 100 otages. Cet acte a déclenché une riposte majeure d’Israël, qui s’est engagé dans une offensive totale contre Gaza, avec l’objectif déclaré de détruire le Hamas. Le conflit s’est rapidement propagé au-delà de la bande de Gaza, impliquant d’autres acteurs régionaux tels que le Hezbollah libanais, les Houthis au Yémen, et des milices chiites irakiennes soutenues par l’Iran. La guerre, qui dure depuis maintenant un an, a coûté la vie à des dizaines de milliers de Palestiniens, et une résolution semble encore lointaine.
Dès le début des hostilités, le Premier ministre Modi a fermement condamné les attaques du Hamas, qualifiant ces dernières d’« acte de terrorisme » et réaffirmant le soutien de l’Inde à Israël dans sa lutte contre le terrorisme. Ce soutien explicite, illustré par un tweet de Modi, a été largement perçu comme une prise de position en faveur d’Israël, rompant avec la neutralité traditionnelle de l’Inde sur cette question.
Toutefois, malgré cette apparente inclinaison pro-israélienne, l’Inde n’a pas complètement abandonné sa politique de soutien à la cause palestinienne. Le ministère indien des Affaires étrangères a réitéré l’engagement du pays en faveur d’une solution à deux États, soutenant la création d’un État palestinien souverain et viable. Néanmoins, l’Inde s’est abstenue lors de votes critiques à l’ONU, notamment sur des résolutions concernant un cessez-le-feu immédiat à Gaza ou des enquêtes sur les violations des droits humains par Israël. Cette abstention, ainsi que la poursuite des exportations d’armes vers Israël, a suscité des critiques, tant au sein du pays que de la communauté internationale.
Le virage de l’Inde envers Israël ne s’est pas fait du jour au lendemain. Depuis l’élection de Modi, New Delhi a multiplié les partenariats stratégiques avec Israël, notamment dans les domaines de la défense, de la technologie et de l’agriculture. L’Inde est désormais l’un des principaux acheteurs d’armements israéliens, consolidant une alliance qui va bien au-delà des sphères commerciales traditionnelles. En 2017, Modi est devenu le premier Premier ministre indien à visiter Israël, un geste symbolique qui a marqué un tournant dans les relations bilatérales.
Cette dynamique s’inscrit dans une vision plus large de la politique étrangère indienne, souvent appelée « Think West », qui vise à renforcer les liens avec les pays d’Asie occidentale. Si les relations avec les pays du Golfe, principaux fournisseurs énergétiques de l’Inde, se sont intensifiées, les relations avec Israël se sont également renforcées dans un contexte de recomposition géopolitique régionale, notamment après les accords d’Abraham.
L’Inde continue toutefois de naviguer avec précaution entre ses relations avec Israël et son engagement historique en faveur de la Palestine. Cette approche pragmatique vise à préserver les intérêts stratégiques de l’Inde dans la région, tout en répondant aux attentes des pays arabes et de sa propre population. En dépit de son soutien militaire et diplomatique à Israël, l’Inde a également envoyé une aide humanitaire à Gaza et a exprimé des inquiétudes concernant les pertes civiles.
Ce glissement progressif vers un soutien plus marqué à Israël reflète les réalités géopolitiques actuelles. Avec l’intensification des alliances entre Israël et certains États arabes, l’Inde a su ajuster sa politique extérieure pour s’adapter à cette nouvelle configuration régionale tout en évitant de froisser ses partenaires historiques du monde arabe.
À mesure que le conflit entre Israël et Gaza se poursuit, la position de l’Inde pourrait continuer à évoluer. Le gouvernement Modi a déjà montré une volonté de s’adapter aux nouvelles dynamiques régionales, et il est probable que l’Inde maintiendra une approche nuancée, équilibrant ses liens avec Israël et la cause palestinienne, tout en poursuivant ses objectifs nationaux et régionaux.
Ainsi, bien que la politique de l’Inde semble s’éloigner progressivement de son soutien traditionnel à la Palestine, il est peu probable que ce soutien disparaisse complètement, étant donné l’importance stratégique et historique de cette région pour New Delhi.
Jforum.fr
Articles similaires
La rédaction de JForum, retirera d’office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.
La source de cet article se trouve sur ce site