Attaque du 7 octobre : « Tout nous ramène à ça », témoigne Adrien, présent dans un kibboutz visé par la Hamas

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Pendant des mois, Adrien a cru entendre des coups de feu lorsqu’un enfant frappait dans un ballon, ou des missiles lorsque le RER passait à proximité. Le Parisien de 44 ans a souffert de stress post-traumatique à la suite de l’attaque du 7 octobre. Ce jour-là, il se trouvait avec sa femme Franco-israélienne et leur bébé de neuf mois dans le kibboutz de Gevim, en Israël, et avait témoigné pour 20 Minutes. Un an après, de retour à Paris, il revient sur ce traumatisme et parle de ses conséquences sur sa santé mentale, son couple, mais aussi de ses doutes sur le fait de rester en France.

Ce 7 octobre 2023, « il est un peu avant 5 heures du matin. On vient de remettre notre enfant au lit après lui avoir donné le biberon lorsque l’on entend une alarme. On sait que la roquette est pour nous. » Briefé par la belle-famille, le couple, tout proche de la bande de Gaza, n’a que quinze secondes pour se mettre en sécurité. « On prend notre enfant et on court jusqu’à l’abri de la maison. Il y a plusieurs vagues de roquettes, ça sonne de manière quasiment continue pendant plusieurs minutes. »

Un stress post-traumatique

A quelques pas de là, des soldats du Hamas tentent d’entrer dans le quartier. « Dès la première alerte, des volontaires qui sécurisent le kibboutz sortent et se retrouvent nez à nez avec des terroristes qui tentent de rentrer par le portail. Ils cherchaient à nous surprendre mais quand ils ont vu que le kibboutz avait été alerté, ils ont fait demi-tour. » Le couple reste calfeutré 24 heures dans la maison, la peur au ventre, avant de pouvoir quitter les lieux. Puis de regagner, quelques jours plus tard, le territoire français.

« La nuit du 7 octobre, on ne savait pas à quelle sauce on allait être mangé vu qu’il n’y avait pas de police dans le quartier et que tous les kibboutz étaient assiégés. Je m’imaginais le pire. » Plusieurs fois, depuis son retour à Paris, Adrien a eu des flashs. « Je voyais les soldats du Hamas rentrer dans la chambre et je me demandais ce que j’allais faire. » Le quadragénaire a souffert, on l’a dit, de stress post-traumatique des mois après cette funeste journée. « Tous les stimuli sensoriels venaient déclencher le souvenir du 7 octobre. » Petit à petit, les images ont disparu de son esprit. Et les symptômes de son stress post-traumatique aussi.

« On ne peut pas faire le deuil et avancer parce que tout nous ramène à ça »

Mais certaines pensées, elles, sont restées. Tous les soirs depuis l’attaque, lorsqu’il couche son bébé, le père de famille pense à un autre enfant. « Le petit Kfir, retenu en otage depuis le 7 octobre, n’a qu’un mois d’écart avec mon fils. Je me dis que ça aurait pu être lui. J’ai la chance de voir mon enfant évoluer, marcher, dire ses premiers mots. Et quand je pense que quelque part à Gaza, il y a ce petit qui est toujours retenu en otage… »

Adrien a d’autant plus de mal à oublier cette journée que l’actualité l’y ramène constamment. « Le problème du 7 octobre, c’est qu’on ne peut pas faire le deuil de ce traumatisme et avancer parce que tout nous ramène à ça, que ce soit lorsque j’allume la télé, la radio ou que je lis un article. Il y a un écho médiatique et politique et forcément, notre souffrance se heurte à des convictions ou des agendas politiques. »

Après sa dernière interview accordée à 20 Minutes, Adrien a arrêté de parler du 7 octobre à ses proches. « Soit ils ne comprenaient pas, soit je me rendais compte que ça ne m’aidait plus. Je voulais passer à autre chose, profiter de mon enfant, de la vie, loin de ce cauchemar. Même si tout nous y ramène… mais physiquement, on n’y est plus. »

Une thérapie familiale

Adrien et sa femme ont tous deux eu quelques séances de suivi psychothérapeutique dans le cadre de la Cump (cellule renforcée d’urgence médico-psychologique, mise en place après les attentats du 13-Novembre). « Petit à petit, ça allait mieux. » Mais le couple, lui, a commencé à vaciller. « On est moins solides psychologiquement, moins patients aussi. Plus sensibles et plus à cran, donc il suffit d’un grain de sable, d’une incompréhension, pour que ça prenne des proportions incroyables. Ma femme m’a dit ce matin que c’était un peu comme si une bombe avait sauté et avait tout retourné sur son passage. »

Pour la préserver, il n’en discute pas avec son épouse. Mais Adrien se questionne sur son envie d’élever son garçon en France « face à la montée de l’antisémitisme », évoquant au passage le Luxembourg. « Pourtant je suis catholique, ma femme est juive non pratiquante et on n’élève pas notre enfant dans la foi. Mais je me pose la question. » Le père de famille espère que le conflit prendra fin « et que les gens arrêteront de se polariser ». Il le reconnaît, il a peu d’espoir. Adrien se veut en revanche plus positif sur son couple. « On a commencé ce matin même (jeudi) une thérapie familiale. Il faudra du temps pour réparer les dégâts faits au couple et à chacun de nous. Mais j’ai bon espoir. Pour le reste, inchallah ! »

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