Les Palestiniens de Gaza ne meurent pas seulement sous les bombes, mais aussi désormais des conséquences de la faim. Les rapports se multiplient sur la famine qui se profile dans l’enclave palestinienne. Il s’agirait d’une stratégie délibérée de la part des autorités israéliennes, dans leur guerre contre le mouvement islamiste Hamas. C’est ce qu’affirme l’ONG Human Rights Watch (HRW).
« Ce que commet Israël, ce sont des crimes de guerre », affirme Ahmed Benchemsi, porte-parole de HRW pour la Moyen-Orient. « Affamer une population, l’assiéger et l’affamer en tant que moyen d’obtenir des fins militaires, c’est un crime de guerre. Quel que soit le but servi et c’est absolument illégitime et inacceptable. »
Déclarations publiques
L’organisation souligne que des responsables israéliens ont publiquement annoncé leur intention de priver les civils de Gaza de nourriture, d’eau et de carburant. Ces déclarations se reflètent sur le terrain, dans les opérations militaires israéliennes.
Ahmed Benchemsi cite trois ministres israéliens, dont celui de la Défense Yohav Galant : « Il a dit dès que les hostilités ont été déclenchées : ‘Nous allons établir un siège complet sur Gaza. Il n’y aura — et il l’a énuméré sur ses doigts — plus d’électricité, plus de nourriture, plus d’eau, plus de fuel, plus rien. C’est terminé.’ Il a ajouté : ‘Nous avons affaire à des animaux humains. Nous devons nous comporter en tant que tel.’ »
Journée sans manger
Les habitants de Gaza doivent régulièrement passer la journée entière sans manger. Selon le Programme alimentaire mondial, la moitié de la population souffre de faim extrême ou sévère. Des agences tentent de faire entrer désormais des biscuits hyperénergétiques, utilisés en cas d’urgence dans les zones où règne la famine.
Dans les hôpitaux visités par des responsables de l’Organisation mondiale de la santé, les patients décèdent non seulement faute de soins médicaux, mais aussi de faim et de soif. « Toutes les personnes à qui je parle, où que j’aille à Gaza, ont faim », explique Sean Casey, coordinateur des équipes médicales d’urgence de l’OMS. « Nous avons affaire à des personnes qui meurent de faim, des adultes, des enfants. C’est insupportable. Les gens demandent de la nourriture, même à l’hôpital. Dans un service d’urgence, quelqu’un qui a une plaie ouverte, qui saigne, demande de la nourriture. »
Ce ne sont pas les conditions de la guerre qui ont précipité la population vers la famine, c’est la volonté délibérée du gouvernement d’Israël de couper les vivres à cette population
« Il est absolument illégal d’assoiffer et d’affamer une population pour obtenir un objectif militaire, quel qu’il soit », souligne le porte-parole de HRW. « Il est tout aussi illégal d’avoir des otages. Ça aussi, c’est un crime de guerre et nous demandons que le Hamas les relâche tous immédiatement et sans condition. Mais conditionner à cette libération la fourniture de nourriture, d’eau d’électricité à 2 millions de personnes, c’est avouer qu’on les punit collectivement. Ce ne sont pas les conditions de la guerre qui ont précipité la population vers la famine, c’est la volonté délibérée du gouvernement d’Israël de couper les vivres à cette population. »
La bande de Gaza, longue de 41 km, n’est pas autosuffisante : elle a toujours eu besoin d’importations de nourriture. Depuis le déclenchement du conflit par le Hamas le 7 octobre, seulement 10% de la nourriture nécessaire entre dans le territoire.
Aide entravée
Ahmed Benchemsi estime qu’Israël entrave l’entrée de l’aide humanitaire par le point de passage de Rafah, entre l’Egypte et la bande de Gaza : « Les camions qui entrent par Rafah doivent d’abord passer par un autre poste frontière israélien pour se faire contrôler. C’est assez compliqué comme procédé : ils passent par ce poste frontière, ils se font contrôler, ils ressortent et repartent en Egypte et rentrent par Rafah. Tout ça est sous le contrôle étroit des Israéliens. Sans leur coopération, rien ne passe. D’ailleurs, ils ont bombardé Rafah avant et ils peuvent le bombarder encore. Donc c’est effectivement tout à fait à leur merci. »
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