L’annonce était attendue depuis plusieurs mois, elle a été confirmée ce samedi 2 décembre. Les régimes militaires du Burkina Faso et du Niger ont annoncé leur départ du G5 Sahel, effectif depuis le 29 novembre dernier. Cette organisation de coopération politique et militaire, largement financée par l’Union européenne, a été créée en 2014 avec le Tchad, le Mali et la Mauritanie afin de lutter contre le djihadisme dans cette région.
Les deux pays ont donc acté le retrait « de l’ensemble des instances et organes du G5 Sahel, y compris la Force conjointe » comptant 5 000 soldats, précise leur communiqué publié dans plusieurs médias locaux, dont le site d’informations Burkina24. Après le retrait du Mali en mai 2022, ces deux pays sont donc les suivants à abandonner leur participation au G5 Sahel. Une décision qui semble annoncer la mort imminente de cette alliance internationale, symbolisant une fois de plus le rejet massif de la présence française dans la région.
Un G5 Sahel jugé inefficace et instrumentalisé
Cette rupture est d’abord expliquée par l’arrivée de militaires à la tête de ces trois pays. Le retrait malien du G5 Sahel avait eu lieu à la suite d’un coup d’État en 2020. La logique semble être la même pour Ouagadougou et Niamey : le Burkina Faso a connu deux putschs en 2022, tandis que le Niger est gouverné par des généraux depuis le putsch de 2023.
Une arrivée au pouvoir favorisée par la colère des habitants face à l’incapacité de leurs gouvernements à endiguer la violence djihadiste. Dès lors, le Burkina Faso et le Niger justifient leur retrait du G5 Sahel par son inefficacité : dans leur déclaration, les deux régimes militaires expliquent que « l’organisation peine à atteindre ses objectifs » et est minée par « des lourdeurs institutionnelles, des pesanteurs d’un autre âge ». Les opérations conjointes de cette force sont en effet restées peu nombreuses depuis 2014, alors que les accusations de bavures se sont multipliées.
Au-delà des critiques sur son fonctionnement, le Burkina Faso et le Niger pointent aussi du doigt les soutiens européens de l’alliance. Le communiqué précise qu’ils ne souhaitent pas « servir les intérêts étrangers au détriment de ceux des peuples du Sahel, [et] encore moins accepter le diktat de quelque puissance que ce soit au nom d’un partenariat dévoyé et infantilisant ». À son retrait en 2022, le Mali avait également dénoncé une organisation « instrumentalisée par l’extérieur ».
Une triple alliance sur fond d’opposition à la France
Derrière ces formules vagues, on perçoit surtout un rejet de la France, dont les trois pays ont obtenu l’indépendance en 1960. Si les gouvernements nigérien et burkinabè précédents étaient proches de Paris, les coups d’État se sont appuyés sur une opposition de plus en plus forte de la population face à l’influence de l’ancien colonisateur. Les jours du G5 Sahel, en partie financé et armé par l’État français, paraissaient ainsi comptés dans ces territoires.
Liés par leur rejet du G5 Sahel et de la France, ces trois pays souhaitent d’ailleurs créer une alternative. Avant même ce retrait de l’organisation de coopération antidjihadiste, les chefs de la diplomatie du Burkina Faso, du Niger et du Mali ont proposé vendredi soir la création d’une union de leurs États autonomes sous forme d’une confédération. Avec « l’ambition de parvenir, à terme, à une fédération » avec un gouvernement commun, précise le communiqué relayé par le média en ligne burkinabè Le Faso. Ces régimes s’étaient déjà rapprochés depuis septembre pour former l’Alliance des États du Sahel, instaurant notamment une assistance automatique en cas d’attaque djihadiste sur leurs sols respectifs.
Ils mettent ainsi en avant un nouveau modèle de défense militaire, voulu plus efficace… Et n’hésitent pas, au passage, à museler les voix critiques sur leurs actions. Samedi soir, le gouvernement burkinabè a annoncé la suspension du quotidien français Le Monde, en réaction à la publication d’un article accusant le régime de mener une « guerre de propagande » concernant une attaque djihadiste à Djibo, fin novembre, ayant tué au moins 40 civils. Une « humiliation » que conteste la junte, qui a promis la fin des violences à son arrivée au pouvoir.
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